mercredi 11 mars 2015

Chronique d'un téléphone ordinaire, 11 mars 2015

Contempler son appartement.
Établir la liste des dossiers à traiter en urgence absolue :
Trier la pile de papiers administratifs qui menace de s’écrouler sur le bureau. 
Ou
Aspirater les poils de chats qui volètent à travers le salon à la manière d’un tumbleweed en plein western.
Ou
Vider la panière de linge sale (ah… la lessive… thème fondateur de ce blog et toujours d’actualité !)
Ou
Laver les vitres qui sont devenues presque opaques.
Ou
Répondre aux 127 courriels urgents qui attendent dans ma boîte mail.
Ou
Faire la vaisselle et ranger la cuisine…

Prendre le temps d’une pensée émue pour sa grand-mère qui ne manquait jamais à chaque printemps de « faire les à-fonds » dans son appartement.

Pousser un grand soupir démotivé et se mettre à dresser en parallèle la liste des stratégies d’évitement possibles :
Profiter du soleil enfin revenu pour aller prendre l’air.
Ou
Écrire une nouvelle chronique pour alimenter son blog.
Ou
Refaire le vernis à ongles de ses doigts de pieds qui est en train de s’écailler.
Ou
Jouer un peu avec la meute féline.
Ou
Téléphoner à Mère-Maman qu’on néglige ces derniers temps pour prendre de ses nouvelles.

Constater que le temps pris à hésiter a permis au soleil de se cacher.
Déplorer d’avoir la tête vide, aucune inspiration pour une nouvelle chronique.
Se souvenir que la bouteille de dissolvant est vide et qu’on n’en a pas racheté.
Admirer la capacité de la meute féline à dormir toute la journée pour ne se réveiller qu’à la nuit tombée.
Empoigner son téléphone et appeler Mère-Maman.

Passer sur les banalités d’usage « Et comment va la voisine et ta chienne toujours aussi fofolle et quel temps fait-il et as-tu des nouvelles de Frérot ? »
Sentir que Mère-Maman a quelque chose à dire. Laisser un blanc dans la conversation pour la laisser s’y engouffrer. 
« Au fait tu sais ma fille j’ai pensé à toi hier il m’est arrivé une aventure digne de ton blog ».

Soigner son ton de surprise et remercier les cours de comédie pris il y a si longtemps : « Ah bon tu connais mon blog ? Tu le lis ? Tu en penses quoi ? »
Savoir que seule la dernière question compte et que le reste n’était qu’entrée en matière.
« Bien sûr que je le connais puisqu’on est amies sur Facebook ! Alors je te disais hier… »
Maudire la capacité de Mère-Maman de ne pas répondre aux questions essentielles.
La laisser raconter.
« Hier donc, j’ai fait la lessive » (Tiens tiens…) « Pendant que la machine tournait, j’ai voulu en profiter pour passer quelques coups de fil. Tu m’excuses, ma fille, je ne te raconte pas l’histoire à l’infinitif, mais bon, l’intention y est ! Donc, je cherche le combiné du téléphone partout, je l’appelle même avec mon téléphone portable mais rien, je ne l’entends pas sonner. Je vais voir dans le panier de la chienne, si elle l’a confondu avec un os, toujours rien. Bon, à force de chercher partout, de retourner la maison, la lessive était prête. J’ouvre le tambour, je sors le linge, quelque chose tombe sur le sol : mon téléphone !!!! Tu imagines ma fille, j’ai passé mon téléphone à la machine à laver !!!! Je crois bien qu’il ne fonctionne plus maintenant, enfin peut-être que si je change les piles… Mais du coup pour l'instant j'ai rebranché mon ancien téléphone, celui qui a un fil en tire-bouchon... »
Remercier Mère-Maman avec empressement, raccrocher en sachant qu’on a trouvé une stratégie d’évitement aux corvées du ménage et de l’administration.

S’emparer de son ordinateur portable et entamer la rédaction d’une nouvelle chronique en contemplant les virevoltants qui se baladent sur le plancher.

Aspirater les tumbleweeds de son salon...


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